La mort inattendue du nourrisson : un sujet encore et toujours d’actualité

La mort inattendue du nourrisson (MIN) est définie comme une mort survenant brutalement chez un enfant de moins d’un an, alors que rien, dans ses antécédents connus, ne pouvait le laisser prévoir. Ce phénomène est aujourd’hui encore la première cause de décès chez les moins d’un an et la France compte parmi les plus mauvais taux de MIN d’Europe. 37 centres de référence planchent sur le sujet afin d’améliorer les statistiques. Nous sommes allés à la rencontre de Bérengère Jarry, infirmière référente dans l’un d’entre eux, le Centre Régional de Référence sur la Mort inattendue du Nourrisson (CRRMN), et coordinatrice technique à l’Observatoire national des morts inattendues du nourrisson (OMIN).

Vous travaillez, entre autres, à sensibiliser les professionnelles à ce risque qu’est la mort inattendue du nourrisson (MIN). C’est un sujet qui est toujours d’actualité ?

Bérengère Jarry : Bien sûr ! Dans les années 70/80, aux États-Unis, on s’est mis à recommander de coucher les enfants sur le ventre. La France a suivi le mouvement et à partir de ce moment-là, on a constaté une augmentation des MIN. Alors, dans les années 90, la campagne « back to sleep » a été lancée afin de repositionner les enfants sur le dos durant leurs nuits et leurs siestes. Le taux de décès a alors chuté. La corrélation était évidente. Mais depuis, en France, nos chiffres stagnent et en moyenne on compte entre 250 et 350 décès d’enfants par an. C’est presque un par jour !


Qu’est-ce qui explique ces chiffres ?


BJ : C’est un sujet extrêmement tabou, qui fait très peur et on peine à sensibiliser ! Dans les maternités, on ne va pas forcément oser parler de ça aux jeunes parents. C’est pourtant fondamental car la moitié des cas pourraient être évités !


C’est-à-dire ?


BL :
Lorsqu’un enfant victime de MIN arrive au CHU, on observe souvent les mêmes scénarios : les parents retrouvent leur bébé décédé dans son lit, après une sieste, entre deux tétées ou le matin au réveil. Ils appellent le SAMU qui se déplace, essaye de réanimer l’enfant et n’y arrive pas.

On parle alors de mort inattendue du nourrisson car, compte tenu des connaissances sur l’état de santé de l’enfant et sur antécédents médicaux, rien ne présageait cette mort.

Puis, ils arrivent au CHU qui va lancer tout un tas d’analyses pour tenter d’en comprendre la cause. Si les parent acceptent, il y aura une autopsie. Parfois, les investigations révèlent des causes alors non détectées. Cela peut-être des malformations, des infections…

Mais pour l’autre moitié des cas, les recherches ne révèlent aucune cause à ces MIN. On parle alors de morts subites du nourrisson qu’une meilleure prévention auprès du grand public, aiderait à prévenir.


Comment procédez-vous pour que le pourcentage de victimes de MIN baisse ?


BJ :
Ici, au CRRMIN on s’emploie récupérer un maximum de données, à les comparer et à les analyser. L’observatoire est devenu un registre, ce qui veut dire que tous les enfants décédés sur le territoire sont, dans la mesure du possible, répertoriés. Ça nous permet aussi de créer des échanges entre professionnels, d’uniformiser notre prise en charge selon les recommandations de la haute autorité de santé.

Actuellement, des travaux de recherche sont lancés, notamment sur la génétique et sur des biomarqueurs. Mais il faut surtout miser sur les campagnes de prévention au niveau des CHU, des cliniques, des services de PMI etc.


Qu’en est-il des cas de MIN chez les assistantes maternelles ou en multi-accueil ?

BJ : Ces MIN concernent environ 8% des cas et sont extrêmement traumatisantes pour les professionnelles. Souvent, ces cas donnent lieu à un obstacle médico-légal donc à une enquête, ce qui fait qu’on ne peut pas prendre contact avec les parents ni avec les professionnelles de la petite enfance pour les accompagner. Cela engendre une grande solitude dans cette épreuve.



Que faire si les parents tiennent à ce que l’enfant dorme sur le ventre ?

L’assistante maternelle ne peut accepter cette demande et doit leur rappeler les risques encourus.



Les bonnes pratiques pour éviter la Mort inattendue du nourrisson (MIN)
  • Coucher l’enfant sur le dos,
  • Prendre soin de dégager son visage (ni doudou, ni drap, ni tour de lit). S’il est obstrué, l’enfant risque de respirer son propre gaz carbonique et s’intoxiquer.
  • Choisir un matelas ferme
  • Choisir une turbulette adaptée à la taille de l’enfant et à la saison.
  • Idéalement, la température de la pièce doit être comprise entre 18° et 20°.
  • Ne pas exposer l’enfant au tabac pendant et après la grossesse. Le tabagisme passif peut abîmer les bronches des tous petits, encore plus fragiles que celles des adultes.

Les chiffres

  • La France compte entre 250 et 350 cas de morts inattendues du nourrisson chaque année.

  • L’âge où la vulnérabilité des enfants est la plus importante est entre 3 et 6 mois et baisse largement à partir de 2 ans.

  • Environ 8% des morts inattendues du nourrisson ont lieu chez l’assistante maternelle ou en multi-accueil 

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